Manque d'adresse 2

À l’attention de F :

D’épaisses surfaces se dégagent de leur couverture pour aller cueillir la douceur de l’air. Nous remarquons comment notre peau s’ouvre au contact de la chaleur. Les rebords dépliés, les pores déployés. Nos zones chantent alors que le four monte.

Habituées à servir notre peau, nous voilà reluisantes de gras et fières de notre parure pleines de nids. Les serrures n’ont plus de clés car nos poches s’en sont délestées.

La maison ronronne et s’écoule. Elle embrasse la tranchée. Monte sur la chaise et regarde la route, loin. Désormais prêtes, à accueillir.

À l’attention de M :

Après avoir trop attendu, la gène est passé. Elle n’a rien laissé derrière elle.
 Si, peut-être un goût de lessive entre les dents. Pour le sentir, il faut les grincer de gauche à droite. Quand la bouche est grande ouverte, on peut lire sur la langue.

La mienne raconte - à ce que l’on dit - qu’elle a peur de trop prendre ; qu’elle se rétracte d’office à la vue des doutes ; que contrairement à ce qu’elle lance, elle ne dépasse pas le centimètre ; que son rose rougit vite et que sa tenue est vulnérable. Mais ça, garde le pour toi.

Je sais que la tienne est plus coriace - malgré ce que l’on dit - parfois je l’envie.

À l’attention de T :

Hier est peint des secousses de demain. Cette journée n’en finit pas de recommencer. Mieux vaut se préparer à monter les heures sans peine, qu’avec la charge d’un autre. Je te prie de croire en l’expression de ton vivant et d’oublier celle de tes sentiments.

Apprêtés au départ, une foule hagarde nous regarde. Elle nous lance des claquements de doigts qui font cliquetis. S’ébrouent avec la plaine qui nous sourit. À peine le pied levé, les arbres s’étendent et la sève écoulée nous présente le lit de nos aventures.

Viens, allongeons-nous avant les pensées.