La caresse

Yem s’éveilla les yeux habités par l’image de cette créature au cou constellé de petites plaques rondes, tel un habit d’écailles. Ses pensées s’attardaient sur elle dans un plan serré à la recherche d’un motif ou d’une couleur dominante, d’un verbe ou d’un mouvement quand soudain une trappe s’ouvrit, laissant échapper une foule de mots en guirlande. On pouvait y lire un vague dehors champion s’étirant à l’infini dans un style gonflé de reflets polis, suivi de près par une cascade de mots défilants

halte enclos sacré j’ai fait des doubles c’est elle qu’on sauve toujours la pluie dilue plus de doute j’ai dressé multiplie je range tes yeux sont mon système une gorge crie l’écart est ma veine reines les cartes dominent et dissimulent…

Les mots s’avalaient les uns les autres disparaissant tour à tour tandis que Yem massait son cerveau. Pourquoi porter un collier de pierres quand je peux m’habiller de vent ?

Yem se leva pour entrouvrir la porte de sa chambre.
Yem se leva pour entrouvrir la fenêtre.

Hier en fumant, un mégot avait bavé brûlant son pyjama d’été aux mailles délicates. Un trou rond sur le torse rappelait ceux du mur percé la veille pour aérer sa chambre. Il a la peau sensible et les trous soulagent ses tensions. La fenêtre en baille, le mur troué, la porte ouverte, Yem étendit ses draps avant d’aller toucher la plainte près de l’entrée et le feutre sous les pieds de sa chaise. El mit le doigt dans un trou à hauteur du regard et retourna s’allonger pour l’écouter parler. El se laissa aller, relâché et senti peu à peu l’air assouplir les muscles de sa nuque. Une araignée présente ce jour-là dirait qu’on habillait son cou et que tout le monde était de mèche.